On parle de trouble de jouissance lorsque le propriétaire d’un logement ne garantit pas au locataire le confort nécessaire dans son habitation ou ne lui permet pas de l’occuper sereinement.
Selon
la loi, le locataire a le droit à une jouissance paisible au sein des lieux
qu’il loue (art 6 de la loi du 6 Juillet 1989). En outre, le code civil prévoit
que le bailleur doit assurer cette jouissance paisible du locataire pendant
toute la durée du bail : “le bailleur est obligé, par la nature du
contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière (…) d'en
faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail" (Art. 1719
du Code civil).
De
plus, propriétaire doit entretenir les locaux et les parties communes en état
de servir à l’usage prévu par le contrat. En effet, l’article 1721 du code civil dispose
qu’« Il est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la
chose louée qui en empêchent l’usage, quand même le bailleur ne les aurait pas
connus lors du bail. S’il résulte de ces vices ou défauts quelque perte pour le
preneur, le bailleur est tenu de l’indemniser ».
L’obligation
d’assurer la jouissance paisible des lieux loués est une obligation qui pèse
sur tous les bailleurs, que le bailleur soit un bailleur du secteur privé ou un
bailleur pour Habitation à loyer modéré (HLM).
Le trouble de jouissance peut se manifester de différentes manières :
- Refus d’installer une boite aux lettres,
- Absence d’installations électriques et de robinets d’eau,
- Cessation de fourniture du chauffage collectif prévu par le bail,
- Refus d’accès à l’ascenseur, etc.
- L’introduction du propriétaire dans le logement sans autorisation du locataire ;
- L’impossibilité d’utiliser une pièce à cause de l’humidité ;
- La présence d’amiante ou autres substances néfastes ;
- La présence d’insectes ou de nuisibles ;
- La persistance de mauvaises odeurs.
Mais
cette obligation de paisible jouissance qui pèse sur le propriétaire n’est pas illimitée.
En effet, le bailleur n’est pas responsable en cas de troubles de fait causés
par un tiers ou par force majeur. Selon l’article 1725 du Code civil : «
le bailleur n'est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers
apportent par voies de fait à sa jouissance, sans prétendre d'ailleurs aucun
droit sur la chose louée ; sauf au preneur à les poursuivre en son nom
personnel ».
Le juge judiciaire a régulièrement
eu l’occasion d’exclure la responsabilité du bailleur pour des troubles causés
par des tiers (Cour de cassation, civile,
Chambre civile 3, 23 juin 2015, 14-13.385, Inédit)
II) Les démarches pour faire
respecter la paisible jouissance due au locataire
La
première démarche à entamer est d’essayer de dialoguer avec le propriétaire
pour lui exposer le problème et tenter de le régler à l’amiable.
Envoyez
un courrier recommandé avec accusé de réception à votre propriétaire en faisant
état du trouble de jouissance. Ainsi, vous aurez une preuve que vous avez tenté
de régler le problème à l’amiable. Pensez à rappeler les références juridiques
qui s’appliquent à votre situation.
Si
le propriétaire ne répond pas dans les 2 mois ou refuse d’accéder à votre
demande, vous pouvez saisir la Commission Départementale de
Conciliation. Celle-ci vous aidera à trouver une solution et fera office
de médiateur entre vous et votre propriétaire.
Si malgré vos démarches amiables les troubles persistent, vous pouvez engager une procédure judiciaire et saisir le juge. Si la justice tranche en votre faveur, vous pourrez peut être obtenir :
-Une réduction (parfois dispense) de loyer jusqu’à l’accomplissement des travaux nécessaires,
- La réalisation de travaux, la mise en conformité ;
- Des dommages et intérêts, des réparations financières pour compenser la non jouissance paisible des lieux.
A
titre d’exemple, un bailleur a été condamné à verser des dommages et intérêts à
son locataire qui ne pouvait pas rester dans les lieux (Cour de cassation (3e chambre civile, 8 novembre 2011, pourvoi
n° 10-31.011). En l’espèce, les juges ont considéré qu’un propriétaire, dont l’appartement présentait une importante condensation en raison d’une aération inefficace et d’un manque d’étanchéité entre
la salle de douche et la pièce à vivre, n’avait pas respecté son obligation de
délivrance et d’entretien du logement (article 1725 du code civil).
Attention : Ne prenez jamais l’initiative de diminuer votre loyer ou de cesser de le payer. Autrement dit, on ne se fait pas justice soi-même.
Selon le juge cassation, « l’inexécution de travaux de réparation par une bailleresse ne pouvait dispenser le preneur de payer le loyer » (Cour de cassation, 3e chambre civile, 22 février 1994, pourvoi n° 92-11.882).
Recommandation : consultez le Décret du 30 janvier 2002 relatif
aux caractéristiques du logement décent. Ce texte décrit, pièce par pièce, les critères
nécessaires pour qu’un logement réponde aux normes de décence en vigueur, ainsi
que les démarches et recours en cas de non-conformité.
Références juridiques:
- Article6 de la loi du 6 juillet 1989
- Article20-1 de la loi du 6 juillet
1989
- Cour decassation, civile, Chambre
civile 3, 8 novembre 2011, 10-31.011, Inédit
- Cour deCassation, Chambre civile 3, du
22 février 1994, 92-11.882, Inédit
- Cour decassation, civile, Chambre
civile 3, 23 juin 2015, 14-13.385, Inédit